BLD Québec 2025 : maturité et action concrète

Si le BLD (B Corp Leadership Development) Québec 2025 a confirmé une chose, c'est que notre communauté a franchi une étape importante. Nous ne sommes plus seulement là pour célébrer notre appartenance à un mouvement, mais pour travailler ensemble à lui donner tout son sens.

L'ambiance cette année n'était pas à l'autocongratulation.

Elle était au travail, à la lucidité et, disons-le, à un certain courage. Le message qui a résonné dans tous les couloirs, des panels aux ateliers : la certification n'est pas une destination, c'est un point de départ.

Voici ce qu'il fallait retenir de cette journée charnière pour le mouvement B Corp au Québec.

Une nouvelle ère de rigueur, au-delà des points

Pour ouvrir le bal, Natalie Riviere (Commetta) a animé un panel qui a réuni Thomas Ferland-Dionne (Boîte Pac) et Caroline Duguay (Agence Cali).

L'approche flexible, où l'on pouvait compenser une faiblesse environnementale par une excellente gouvernance, laisse place à une vision plus holistique. Les nouveaux standards marquent un changement de paradigme nécessaire pour la crédibilité du mouvement.

Désormais, des non-négociables s'installent : climat, salaire décent, droits humains. Il ne s'agit plus de "cocher des cases", mais de démontrer une performance continue sur ces enjeux vitaux.

Comme l'ont souligné les discussions, ces standards plus élevés sont une excellente nouvelle pour la crédibilité du mouvement. Ils agissent comme un rempart contre l'impact washing.

Thomas a été très clair : « La certification est juste le début. » Il ne faut surtout pas attendre l'échéance de la recertification pour se pencher sur ces standards. La clé est de mobiliser les équipes au quotidien, notamment via un Comité B Corp, sans ajouter de lourdeur administrative.

Le conseil de Caroline pour les PME : Si vous êtes une jeune entreprise, intégrez ces standards maintenant. C'est beaucoup plus facile de bâtir une maison solide dès les fondations (B Corp by design) que de rénover un gratte-ciel habité!

L'alignement de la chaîne de valeur : un levier incontournable

Le panel sur la chaîne d'approvisionnement, animé par Clémentine Freire, a mis en lumière un concept puissant : la cohérence radicale.

Être vertueux à l'interne est un excellent début, mais l'impact de votre entreprise s'étend bien au-delà de vos murs. Vos achats sont un vote quotidien pour le type d'économie que vous souhaitez soutenir.

• L'exemple Equifruit : Pour Jennie Coleman, le respect des droits humains n'est pas une option à cocher, c'est le cœur du modèle d'affaires. La traçabilité doit être totale.

• L'approche Kotmo : Céline Juppeau a rappelé que choisir le local, c'est bien plus que réduire les GES. C'est dynamiser l'économie sociale d'ici.

Chaque dollar que votre entreprise dépense est un vote. 

Vos fournisseurs partagent-ils vos valeurs? 

Si l'alignement n'est pas là, voyez-y une opportunité de dialogue avec eux, ou l'occasion de rediriger votre pouvoir d'achat vers des partenaires qui amplifient votre mission.

De la mesure d'activité à la mesure d'impact

L'atelier de Credo, avec Ghani Kolli et Jacob Yvon-Leroux, nous a rappelé une distinction cruciale qui devrait être affichée dans toutes les salles de réunion :

Performance ≠ Impact

• La performance, c'est ce que vous faites (ex: on a formé 50 employés).

• L'impact, c'est ce qui a changé dans le monde grâce à cela (ex: ces employés ont réduit les déchets de l'entreprise de 20%).

Mesurer nos activités (ce que l'on fait), c'est essentiel, mais ce n'est que la première marche. Pour atteindre l'impact réel, il faut mesurer le changement concret que ces activités génèrent. Sans cela, on risque de confondre mouvement et progrès.

Une nuance importante a aussi été soulevée : la définition du washing évolue.

Aujourd'hui, une entreprise qui a les moyens de faire énormément, mais qui se contente du minimum, passe elle aussi à côté de sa mission. L'impact, c'est aussi une question de potentiel réalisé.

S'organiser pour durer

La recertification est un processus exigeant qui peut devenir lourd s'il n'est pas anticipé. L'atelier de Camille Fortier-Côté (Niché) n'était pas juste "inspirant", c'était un cours de survie organisationnelle.

Camille nous a donné accès à ses outils avec une transparence désarmante. Voici sa méthodologie concrète pour ne pas procrastiner la recertification :

• La force du collectif : Évitez de laisser la certification reposer sur les épaules d'une seule personne. Un Comité B Corp diversifié (RH, Opérations, Direction) qui se réunit régulièrement assure la pérennité de la démarche.

• La référence absolue : Centraliser vos preuves et données dans un "Dossier Maître" unique et accessible. C'est la mémoire de votre impact.

• La documentation en continu : Prenez l'habitude de documenter vos bons coups au fur et à mesure. C'est le meilleur moyen de valoriser le travail accompli sans stress inutile.

JEDI : Construire l'inclusion, une brique à la fois

L'atelier de Julie Savaria (Masla Empathy Lab) nous a rappelé que les principes JEDI (Justice, Équité, Diversité, Inclusion) ne sont pas une simple politique RH, mais une compétence organisationnelle à part entière.

Avec la métaphore des blocs LEGO, Julie a illustré que la culture inclusive se bâtit "une brique à la fois". Il ne s'agit pas de tout révolutionner du jour au lendemain, mais de poser des questions courageuses :

• Pouvoir : Quels systèmes de pouvoir devons-nous remettre en question à l'interne ?

• Représentation : Quelles voix ou quels savoirs sont absents de notre gouvernance ?

L'approche retenue : "Ce qui est petit est bon." N'ayez pas peur de commencer par des actions modestes, tant qu'elles sont intentionnelles et qu'elles s'attaquent aux racines des iniquités plutôt qu'aux symptômes.

Action Climatique : Justice et Circularité

Enfin, Clementina Consens (B Lab U.S et Canada) a bouclé la boucle en liant l'urgence climatique à la justice sociale. Les nouveaux standards nous poussent à aller au-delà du simple bilan carbone pour embrasser la Justice Climatique.

Pourquoi ? Parce que les changements climatiques affectent de manière disproportionnée les communautés marginalisées (souvent appelées "frontline communities").

Le changement de cap : L'invitation est de passer d'une économie linéaire à une économie circulaire, tout en collaborant directement avec les communautés les plus touchées. L'action climatique n'est plus juste une question technique d'ingénierie, c'est une question de solidarité humaine et de partenariat équitable.

Du courage et de l'authenticité

Nous ressortons du BLD 2025 avec une boîte à outils remplie et une vision claire. La certification B Corp est un exercice d'humilité et de persévérance.

C’est aussi un outil puissant, mais c'est à nous, dirigeants et intrapreneurs, de l'utiliser pour transformer le système.